
L’utilisation des sous-produits agricoles dans la culture des champignons : une solution durable |

« Avec le soutien de PRICNAC, un projet financé par l’Union Européenne à travers le Fonds ACP pour l’innovation et mis en œuvre par un consortium coordonné par l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) »



Introduction
La culture des champignons comestibles représente une alternative agricole innovante, durable et accessible, répondant à la fois aux enjeux économiques et écologiques actuels. Elle offre de multiples avantages, notamment la possibilité de diversifier les sources de revenus pour les agriculteurs tout en contribuant à la préservation de l’environnement. Dans ce contexte, le Projet de Dissémination des Innovations pour le Développement Durable en Zone Rurale (ProDIDeDZR), mise en œuvre au Cameroun par Assainissement et FODER a joué un rôle clé en introduisant des techniques novatrices pour valoriser des sous-produits agricoles, en particulier les rafles de maïs, comme substrat pour la culture des champignons comestibles.
Des formations pratiques ont été organisées dans plusieurs localités, telles que Ngambe-Tikar, Foumbot, Ntui et Yoko, avec pour objectif de renforcer les compétences des agriculteurs locaux. Ces sessions ont permis de transmettre des connaissances techniques sur la culture des champignons, en mettant l’accent sur l’utilisation optimale des ressources disponibles, notamment les résidus agricoles comme les rafles de maïs, qui sont souvent laissées de côté. En recyclant ces matières premières, les agriculteurs peuvent non seulement réduire leurs coûts de production, mais aussi contribuer à une gestion plus responsable des déchets agricoles. Les formations ont abordé l’ensemble du processus de culture des champignons, depuis la préparation du substrat jusqu’à la récolte. Ce projet répond à une demande croissante de produits agricoles à haute valeur ajoutée, en particulier des produits alimentaires sains et accessibles. Il offre aux agriculteurs une nouvelle voie pour accroître leurs revenus en diversifiant leur production tout en respectant les principes de durabilité. De plus, en introduisant la culture des champignons dans les exploitations agricoles locales, le projet vise à renforcer l’agriculture locale et à encourager une économie circulaire, dans laquelle les déchets agricoles sont transformés en produits à forte valeur ajoutée.
Ainsi, en formant les agriculteurs aux techniques de culture des champignons comestibles et en leur fournissant des outils adaptés pour une gestion durable de leurs ressources, le projet ProDIDeDZR favorise un développement agricole résilient et respectueux de l’environnement. Cela contribue à la fois à l’amélioration des conditions de vie des producteurs locaux et à la préservation des écosystèmes agricoles, tout en répondant à la demande croissante pour des produits alimentaires sains et durables.
Matériels
Le matériel de production des champignons utilisé dans le cadre de ces formations comprenait plusieurs éléments essentiels, nécessaires pour créer un environnement propice à leur croissance. Il s’agissait notamment de : moulins à concasser, bassine, stérilisateurs (fût à vapeur servant de stérilisateur), seaux gradués (pour les mesures de l’eau et autre), bâches (pour réceptionner les substrats humectés), sacs (pour garniture), ficelles (pour attacher le stérilisateur), fourchettes (pour les prélèvements), cuillère à café (pour mesurer la quantité d’urée et de fongicide), gangs, cache-nez, eau de javel (pour stériliser le matériel et la chambre noire).
Les consommables pour la production était : la semence (Mycélium), la chaux éteinte, une boîte de Fongicide de marque Banko de préférence +, l’Urée, des emballages en plastique polyéthylène/polypropylène.
Déroulement de la formation
La formation s’est déroulée en deux phases, une phase théorique et une phase pratique.
- La phase théorique de la formation : dispensée en salle, cette phase était essentielle pour fournir aux participants les connaissances de base sur la culture des champignons (fig.1). Elle incluait la présentation des champignons, du matériel nécessaire, et des étapes de production. Cette phase préparait les apprenants à la pratique en leur donnant les informations nécessaires pour manipuler correctement les outils et comprendre le processus.
- La phase pratique : cette phase offrait aux participants l’occasion pour les participants de toucher du doigt et d’expérimenter la culture du champignon, qui se passe par trois étapes essentielles : la préparation du substrat, l’inoculation et la mise en salle.
Cette approche, qui allie théorie et pratique permet d’assurer un avenir durable et prospère de la production de champignons au sein des communautés.
Préparation du substrat
La production de champignons commence par le broyage des rafles de maïs à l’aide d’une concasseuse. A cet effet, une concasseuse a été présenter et remise à chacune des communautés (tableau 1, fig.2). Cet outil est clé dans la production des champignons, car il permet de réduire les rafles en petites particules sans toutefois les émietter. La remise de cette machine s’inscrit dans l’engagement d’Assainissement de rendre chacune des communautés autonomes dans la préparation du substrat pour la culture des champignons.


Figure 1 : Formation théorique


Figure 2 : Remise solennelle de la concasseuse, démonstration de manipulation
Tableau 1 : Nombre de participant
Villages | Associations | Femmes | Hommes | TOTAL |
Yindji (Ngambe-Tikar) | Association des femmes du village Yindji | 18 | 10 | 28 |
Baïgom (Foumbot) | GIC agro FESOBA de Foumbot | 23 | 05 | 28 |
Ndjamé (Ntui) | Association des femmes de SOCONTUI | 20 | 07 | 27 |
Guervoum (Yoko) | AFEDD de Gervoum | 25 | 01 | 26 |
TOTAL | 86 | 23 | 109 | |
Pourcentage | 78,90% | 21,10% | 100% |
Après une démonstration du fonctionnement de la machine par les formateurs, les participants se sont adonnés à l’exercice de broyage des rafles de maïs, attestant ainsi de leur efficacité et leur implication. La production conséquente de substrat pour les ballots, allié à une réserve suffisante pour de futurs exercices, démontre la capacité des communautés à mettre en pratique ce qu’elles ont appris et à assurer la pérennité de cette activité agricole. Les rafles ainsi broyées ont par la suite été soumisse à un processus de pasteurisation, essentiel pour créer un environnement propice à la croissance du mycélium tout en éliminant les agents pathogènes. A cet effet, une solution de pasteurisation a préalablement été préparée à base de chaux éteinte, d’eau, de fongicide et de l’urée (fig. 3 et 4).


Figure 3 : extinction de la chaux
L’urée, un engrais azoté, a été introduite dans la solution pour stimuler la croissance du mycélium en fournissant l’azote nécessaire à son développement. Le fongicide quant à lui était utile pour prévenir la contamination du substrat par des champignons pathogènes. Il était essentiel de bien doser le fongicide pour qu’il soit efficace tout en ne nuisant pas au développement du mycélium des champignons comestibles.


Figure 4 : préparation de la solution de stérilisation


Figure 5 : Humectation du substrat
Par la suite, la solution préparée a été aspergé progressivement sur le substrat, en veillant à ce qu’il soit uniformément humidifié (fig. 5). Une humidification adéquate était cruciale pour favoriser la pasteurisation et préparer le substrat à recevoir le mycélium. Le substrat ainsi humidifié a été emballé en ballots dans des sacs plastiques, en portions de 1 à 2 kg maximums (fig.6). Les ballots formés ont été pasteurisés (fig. 7, 8 ,9) pendant 4 heures, pour éliminer les microorganismes indésirables. L’empaquetage homogène était nécessaire pour assurer une incubation uniforme du mycélium, facilitant une croissance optimale. La pasteurisation, utilisant des températures plus modérées, permit de tuer les micro-organismes nuisibles tout en préservant les nutriments essentiels pour la croissance du mycélium. Cela garantit un environnement propre et propice à l’inoculation, sans risquer la contamination par des bactéries ou des moisissures.


Figure 6 : Empaquetage en ballot


Figure 7: Collecte du bois pour la pasteurisation


Figure 8 : Transport et chargement du stérilisateur


Figure 9 : Stérilisation en cours
Une fois pasteurisé, le substrat est prêt à recevoir l’inoculation de mycélium, marquant le début proprement dit de la culture des champignons.
inoculation du mycélium
L’inoculation (fig. 10) est une étape cruciale, marquant le début du processus de colonisation du substrat par le mycélium. Il était essentiel que le mycélium soit réparti de manière uniforme dans tout le substrat pour garantir une croissance homogène des champignons, car une distribution inégale pourrait limiter le rendement ou entraîner des infections. Après l’inoculation, le substrat a été placé dans un environnement à température contrôlée, généralement entre 20 et 25°C, pour permettre au mycélium de se propager uniformément et de coloniser l’ensemble du substrat avant la phase de fructification.


Figure 10 : Inoculation du mycélium aux substrats
Tableau 2 : Production par localité
Localités | Quantité de rafles broyées (sac de 100 kg) | Nombre de ballot (1,5 kg) |
Yindji (Ngambe-Tikar) | 8 sacs (environ 200 kg) | 100 |
Baïgom (foumbot) | 10 sacs (environ 250 kg) | 120 |
Ndjamé (Ntui) | 6 sacs (environ 150 kg) | 90 |
Guervoum (Yoko) | 6 sacs (environ 150 kg) | 90 |
Total | 30 sacs (environ 750 kg) | 400 |
Dépôt dans la chambre noire


Figure 11 : Chambre d’incubation
Après l’inoculation du substrat, celui-ci a été placé dans un environnement sombre pendant 2 à 3 semaines pour permettre au mycélium de coloniser complètement le substrat. Une fois cette phase terminée, le substrat a été transféré dans un endroit plus frais avec une humidité élevée (85-90 %) et parfois une lumière indirecte, créant ainsi des conditions favorables à la formation des primordiaux, de petites « gouttes » blanches qui deviendront les champignons. 400 ballots inoculés ont été produits lors de cette formation dans les 4 localités, et placés dans des champignonnières (tableau 2, Fig. 11).
Conclusion
En conclusion, la formation sur la culture des champignons c’est révélée un succès, démontrant non seulement la faisabilité mais aussi l’enthousiasme des participants envers cette nouvelle compétence agricole. Cette compétence symbolise non seulement un pas vers l’autonomisation alimentaire et financières des participants, notamment les femmes qui étaient les plus représentées. Ces femmes sont désormais équipées pour transformer cette compétence savoir en pratique pérenne, contribuant ainsi à une économie locale plus diversifié. La réussite de cette formation a posé des jalons pour les projets futurs au sein des communautés rurales.